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MORT ANNONCEE

by Balnave Records

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Noventa, 35 piges, vieux con fatigué. Ici, c’est le bal des petits, des dangereux, des frustrés. Il m’arrive encore de me demander pourquoi ils ont tout, pourquoi on n’a rien - l’antonyme du bankable depuis 1996, loser persévérant. Ils disent qu’ils ne m’aiment pas mais n’ont jamais écouté un seul de mes titres. Ne t’approche pas, aujourd’hui je mords même si mes dents ne raclent toujours pas le parquet. Ouais, quand ça tourne en rond, moi je me ronge les sangs. Si tu n’écoutes pas les textes, tu risques de bouger la tête mais si tu reçois ce que je te dis, tu vas figer ta nuque. Non, j’ai jamais cherché à être underground, c’est l’underground qui m’a kidnappé. Maintenant ça suffit, libérez-moi. Il est fort probable que mon son n’ait pas franchi la lisière Est - ouais pas plus loin que Vaulx-en-Velin Marcel Cachin. A l’époque, je n’avais pas vraiment le profil pour passer dans l’émission d’Olivier Cachin. Depuis j'ai trouvé les mots pour le dire. Je n’ai pas cessé de les postillonner en imitant le crachin. Et aujourd'hui je suis un peu moins dangereux. Ça fait 15 ans que je parle de la mort annoncée d’un rappeur méconnu, complètement transparent, sans crédit, apparemment même pas digne d’être un peu traîné dans la boue. Ouais, ça sent la fin - étrange, cette odeur, je ne connaissais pas. Le vent était contre moi alors je me suis tu. Le signal était amplifié et j’ai arraché les plombs avec les dents. J’ai broyé mes entrailles avec le cœur. Mon micro n’est qu’un outil qui m’a servi de marteau pour faire taire, enfoncer bien profond dans ma tête mes propres pensées. J’ai mis toutes mes convictions sur le trottoir et personne ne me les a jamais ramassées. J’ai secoué mon ordinateur et des milliers de mots en sont tombés. Et comme le bouche à oreilles ne fonctionnait toujours pas, je me suis acheté un bâillon. Car quand même les plus petites fourmis fonctionnent comme MTV, la cigale se tait. La haine, c'est comme tout, ça se cultive - sauf que ça ne demande pas beaucoup d'efforts, crois-moi. J’ai passé 10 ans à le clamer, je n’ai trouvé d’une dizaine d’oreilles pour l’entendre. Je pensais le crier, je n’ai fait que murmurer. Et je n’ai croisé aucun regard. Il fait noir et je m’acharne encore à vivre les volets fermés. Leur indifférence faisait froid dans le dos, elle a fini par glacer notre sève, nous a figés dans nos musées de cire. Je ne laisserai jamais personne me faire la courte échelle car je ne veux pas qu’on voie ce que ça me fait quand je regarde de l’autre côté. L’ascenseur social, on lui a dégondé la porte. Ils me toisent encore un peu, si peu, je ne vaux pas une thune, c’est vrai, mais j’écris mieux qu’eux, c’est toujours ça de pris. Quand j’angoisse, je fais ce que font les plus faibles, je deviens pale et pallie avec un produit quelconque. Parfois, je voudrais qu’on m’anesthésie, juste une heure, pour que je puisse reprendre mon souffle. Moi, des raisons de me lever, je n’en ai plus. Et des raisons de continuer à te parler, je n’en trouve plus. Les mots dans ma bouche ont presque tous fondu sur l’asphalte car je les ai crachés sur la place publique, déserte. J’ai trompé ma fierté car j’ai croisé l’orgueil sur ma route, il ne m’a jamais quitté - l'orgueil, celui qui te ronge les boyaux, qui te fait sentir vivant alors qu'il te tue à petit feu. Eux ont troqué leur bienveillance contre de la condescendance sans s‘en apercevoir. Ils ont oublié de nous donner à manger et on a à peine réclamé en chuchotant. Et leur condescendance n'a fait que s’amplifier, que faire grandir notre orgueil. J’ai cru que la pluie avait effacé ma craie mais c’est eux qui ont rayé mon nom sur la liste - et j’ai dû jeter l’éponge. Ils n’ont pas eu à effacer mes pas car j’ai toujours marché dans la neige en plein cagnard. Non, on n’est pas tombé car on a passé notre vie à ramper, on ne tenait pas debout. J’aurais préféré laver leur cerveau mais je n’en avais pas le pouvoir. J'aurais voulu leur faire ravaler leur dédain en remettant leurs mots dans leurs bouches avec le poing, mais je n'en avais plus la force. J’ai laissé mourir mon dernier album dans son œuf, tranquillement, en silence. Et j’ai craché les plombs par la fenêtre. On a tous un petit noventa en soi qui ne demande qu’à s’exprimer. Et quand noventa se taira, ça voudra dire qu’on aura perdu. Je vous enverrai ce texte pour le poser sur ma tombe. C’est la mort annoncée d’un rappeur méconnu, il s’est étouffé avec ses propres mots et personne ne s’en est ému. C’est la mort annoncée d’un rappeur méconnu, il s’est étouffé avec ses mots et personne ne s’en est aperçu. Quand noventa se taira, ça voudra dire qu’on aura perdu.
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credits

released September 13, 2013

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